NOTION DE POLITESSE. ft. Precious
| Il me fallait me lever très tôt ce matin-là ; Chant de la Brume m'avait demandé d'aller recueillir de l'herbe à chat près des jardins de bipèdes. La saison froide terminée, il nous fallait remplir les réserves de nouveau.
J'eus de la difficulté à sortir de la tanière sans éveiller les autres apprentis ; les litières étaient désordonnées, souvent placées près de l'entrée. Dès que j'eus passé le rideau de lierre, la douceur des rayons matinaux m'enveloppa. Je m'arrêtai, fermai les yeux et pris une grande inspiration, m'assurant de profiter de chaque arôme printanier. La saison des feuilles nouvelles était ma préférée, le soleil revenait tranquillement et nous offrait sa chaleur réconfortante, comme une récompense après la dure saison qui avait précédée.
Je rouvris les yeux et me dirigeai, par habitude, vers la tanière de ma mentor. Mes petites pattes incolores se trempait de rosée au fur et à mesure que je me déplaçais. Je secouai une patte avant dans l'espoir de me débarrasser du surplus d'eau que ma dense fourrure avait emmagasiner, sans succès. Je croisai quelques guerriers qui s'apprêtaient à partir pour la patrouille de l'aube. Ils me proposèrent de me conduire à la frontière près de la maison, mais je refusai leur offre poliment ; je ne souhaitais pas être un boulet et je savais que j'y arriverais seule d'une manière ou l'autre.
Une fois rendue à la tanière de la guérisseuse, j'introduis ma tête entre les lierres pour voir si elle était éveillée. Il s’avéra qu'elle n'y était tout simplement pas, elle devait avoir pris pour acquis que je me lèverais plus tard. Je pivotai et balayai le camp du regard pour m'assurer qu'elle n'y était pas. En vérité je n'avais pas vraiment besoin de la voir, mais c'était la première fois que j'allais aussi près des bipèdes et, même si je ne voulais pas me l'avouer, j'aurais aimé avoir plus de conseils. Je me résignai tout de même à partir, je n'avais pas vraiment le choix.
Je savais que le chemin le plus facile à suivre pour se rendre à l'habitation était de suivre le petit chemin que les bipèdes empruntait qui sert désormais de frontière entre mon clan et celui du Ciel. Par conséquent, je commençai a marcher en direction de cette frontière. Plus je m'éloignais du camp, plus je me sentais seule.
Le soleil montait graduellement et était presque au niveau du pâle spectre de la lune, qui ne s'était toujours pas laisser engloutir par le jour. Après ce qui me sembla des heures de marches, j'étais enfin arrivée à la frontière. Lorsque l'odeur caractéristique du Clan du Ciel remplit mes narines, j'eus, malgré moi, un frisson de dégout le long de l'échine. Je me dépêchai à parcourir le chemin restant en espérant arriver vite au jardin des bipèdes.
Dès que je commençai à distinguer la maison de bipèdes à l'horizon, j’accélérai le pas d'avantage. En approchant, l'édifice était beaucoup plus intimidant que je ne l'aurais imaginé ; je devais me dépêcher, prendre les herbes et déguerpir. Je m'enfonçai dans les mauvaises herbes entourant le jardin et scruta les plants hétéroclites. Je distinguai l'herbe à chat, plantée entre des perces-neiges et quelques eranthes jaunes. Je me faufilai en tâchant de n'écraser aucune fleur et commença à arracher un petit bouquet d'herbe quand j'entendis un raclement de gorge, grave et empli de sous-entendus. Je me retournai lentement, la gueule remplie des plantes médicinales.
Devant moi se trouvait un matou intimidant, un peu en surpoids, à la fourrure semblable à la mienne ; blanche, longue et touffue. Ses yeux d'un bleu incroyablement glacial me fixaient avec ce que j'ai interprété comme de la désapprobation. Je m'empressai de déposer les herbes devant moi et je reculai de quelques pas. J'en avais déduis que j'étais présentement sur les terres de ses bipèdes, dans son jardin, en train de piller ses herbes. Mon coeur se mit à battre rapidement, non pas que j'avais peur de ce chat, mais que s'il ne me permettait pas de prendre ses herbes j'aurais parcouru ce chemin pour rien et que je reviendrais la gueule vide. Je décevrais Chant de la Brume et moi-même. Je devais absolument ramener ses herbes, je n'allais pas retourner bredouille au camp.
-Je suis vraiment désolée, je... est-ce vos plantes ? |